Friday, December 23, 2011

Cameroun



Au programme j'ai la "Ring Road", une route montagneuse près de la frontière Nigériane, dans la région anglophone. Je rejoins vite Bamenda, et j'hésite un tout petit peu d'aller "visiter" la route qui va vers le Nigéria, réputée comme une des plus pourrie d'Afrique. Bof, prochaine fois peut-être.



La route commence à se dégrader sérieusement. En fait, ils ont mis un minimum de goudron dans les montées/descentes pour que ça reste passable en saison des pluies, mais les reste est de la piste bien pourrie, avec des gros trous partout. Donc c'est slalom et travail du dos pour amortir les chocs, c'est assez pénible et pas forcément très amusant. Par contre le paysage est superbe, ça compense.





Les quelques hôtels ne font pas très envie, je m'arrête dans un village et demande s'il y aurait un endroit pour passer la nuit. Des gars m'amènent vers une maison en hauteur, où une femme m'accueillit gentiment, il se trouve que c'est la femme d'un ex-député au parlement. Elle est un peu gênée de me proposer une chambre toute simple sans "confort". Je lui explique que c'est parfait, et que j'ai besoin de rien, mais elle me fait quand même amener une bassine d'eau chaude pour me doucher et me prépare à manger pour le souper. Faut dire qu'on est à plus de 2000m d'altitude et que l'eau est glacée. Le lendemain matin, il fait même frisquet, 10 degrés à peine. La maîtresse de maison me prépare encore un petit déjeuner et je la quitte admiratif devant sa générosité et sa gentillesse.



La route pourrie continue sur quelques km, puis s'arrête brusquement. A partir de là c'est carrément du franchissement qu'il faut faire, et c'est carrément impossible dans une voiture normale (et les Camérounais sont prêts à tout). Ca me va bien, y'a presque plus aucun trafic à part une ou deux motos. Je passe dans des villages un peu isolés et tout d'un coup je rencontre une route en goudron nickel qui branche vers la montagne.



En fait il s'agit de la route d'accès pour le lac Nyos, un lac qui a connu sont heure de gloire lorsqu'il est rentré en "éruption gazeuse", et à libéré d'un coup des tonnes de CO2 qui sont allés tuer des milliers de villageois. Depuis, les village ont été évacués et des scientifiques ont installés un système de dégazage du lac, en fait un siphon auto-alimenté qui recrée un petit air de jet d'eau de Genève.



Les autorités ont installé là 5 soldats qui sont sensés garder les installations et, probablement, empêcher les locaux de se réinstaller dans la région. Ils ont été largués sans véhicule ni électricité, avec de l'eau et de la nourriture pour 1 mois. Du coup, ils se font chier comme des rats morts. Ils ont déniché un point précis où ils arrivent à peu près à accrocher le réseau pour lancer des coups de fils, mais ils doivent marcher plusieurs heures jusqu'au prochain bled pour recharger leur portable sur un groupe. Ils ont aussi une chambre pourrie à louer aux touristes de passage (il parait qu'un motard belge m'a précédé d'un jour), mais un prix excessif. J'arrive à les convaincre que cet argent va directement dans le réservoir de la Merco d'un ministre, et qu'il vaut mieux que je donne mon fric aux locaux. Faut dire qu'ils ont aussi les boules d'avoir été balancés ici. Du coup, le lendemain je leur laisse un peu de pognon pour acheter du crédit pour leur téléphone.



En attendant je profite du lac pour me baigner et me laver. Le lendemain, je renonce à compléter le tour et je reviens sur mes pas, d'une part parce que le dernier bout de piste destroy était sympa, et d'autre part j'avais remarqué un embranchement vers le nord qui me permet d'éviter de revenir vers Bamenda et me taper du goudron merdique.



La route en question n'est pas sur ma carte, et probablement pas dans les habitudes des Camérounais non plus parce qu'elle est très peu fréquentée et (donc) excellente. Ca commence par une descente très raide mais goudronnée, pour arriver à un plateau et une très bonne piste où je peux un peu m'amuser.



Pas longtemps pourtant, à un barrage un flic me fait remarquer que j'ai crevé: j'avais même pas remarqué, c'est vrai que ça flottait un peu.. hem. Je me mets à l'ombre et commence à réparer ma roue.



Les gars qui glandaient par là me donnent un coup de main pour sortir le pneu de la jante (toujours la galère) et un des gars m'emprunte mon kit pour réparer la chambre de sa moto. Bon échange procédés.



En face, des mecs sont en train de charger un Pinz avec des bidons pour aller faire le plein d'essence de contrebande au Nigéria. Bizarrement, j'en ai rencontré plusieurs dans ce coin, et que ici, mais ils ont raison, en tout terrain ça craint rien et tu peux les charger comme des mules. En tous cas ils ont plus de gueule avec leur nouvelle peinture que quand ils servaient dans l'armée suisse (ou autrichienne ?).



J'arrive bientôt à un croisement et je me renseigne auprès des villageois: à droite c'est la route vers Banyo, et à gauche? aussi.. mais à travers la montagne. Ah-ha. Ca me parait bien, donc je prends à gauche. Mais en arrivant au pied de la montagne il commence à faire tard et je suis crevé.



Je vais voir à la chefferie à Somié, et le chef m'accueille très simplement. Rien à voir avec Bandjoun, c'est un tout petit village et la chefferie consiste en 2-3 bâtiments pourris. Mais les villageois montrent tout autant de respect et de déférence envers le chef.



Il pose pour la photo avec son sceptre, très digne. Il est cool, en fait, et de mon coté de ne lui donne pas de la "Votre Majesté" qui me semble un peu bizarre. C'est un ancien prof, il parle très bien français (ce qui n'est pas le cas de tout le monde, loin de là). On discute et il me raconte un peu les coutumes locales et le protocole imposé au chef. Il me laisse étendre mon matelas et ma moustiquaire sans me réclamer d'argent, très simplement. C'est ce que j'apprécie, du coup je lui refile quand même un peu de thunes en partant, vu qu'il a pas l'air de rouler sur l'or.



Le lendemain, je le quitte en direction de la "fameuse route des motards" comme il dit.. hmmm ok. Effectivement, après 2-3 km la route arrive au pied de la montagne et monte presque droit en haut, sans s'encombrer de trop de virages. Elle a pas l'air d'être entretenue du tout, super ravinée avec des gros trous et des pierres partout. Comme c'est aussi très raide, ça devient assez périeux avec ma bécane un peu trop chargée de l'arrière. Mais un petit challenge fait du bien de temps en temps.



Evidemment, je finis par coucher ma bécane sur un passage un peu plus raide. C'est là que j'entends un bruit de tronçonneuse. Ou plus exactement, un 2-temps poussé à fond, qui se trouve être une moto qui monte péniblement la même route. Le pilote est aussi surpris que moi (et peut-être un peu déçu de voir que même avec une bécane de course on se viande comme une merde).



Je repars à l'arrache et cette fois j'assure jusqu'au sommet. J'attends un peu le gars pour le remercier mais il n'arrive pas. Hmmm, j'espère qu'i est pas tombé en rade, mais y'a peut-être aussi un chemin de traverse que j'ai pas vu.



La suite est plus tranquille, je rejoins la route principale et un bled pour faire du change et le plein. J'ai croisé plein de bureaux de change sur la route, mais maintenant que j'en ai besoin, j'en vois plus. Je vais donc négocier le taux avec le libanais du coin, et change 50€. Le bled a aussi 2 pompes à essence, mais complètement abandonnées: ici tout le monde se fourni au marché noir en essence du Nigéria: elle coûte 3 fois moins chère là-bas, et revendue ici à 500 CFA au lieu de 595 CFA au prix officiel.




J'ai pas de plan précis pour la suite, sauf d'aller voir les montagnes de Mandara tout au nord. Mon dos en a pris un coup ces derniers jours, je dois encore me réhabituer, alors je préfère prendre la route goudronnée même si ça fait un peu un détour.



J'avale des kils donc, jusqu'à ce que la lumière déclinante me pousse à chercher un coin pour dormir. Les villages sont au bord de la route, pas idéal question tranquillité, mais le trafic devient presque inexistant après minuit alors c'est pas trop gênant. Le chef du coin me propose un coin de case, et un baquet d'eau pour me laver. Nickel.



Le lendemain c'est goudron encore, et finalement j'en ai quand même marre et je prends une piste qui longe la frontière Nigériane. Très bonne piste en fait, dans des collines (pas vraiment de la montagne) très jolies, et très peu de trafic donc je bouffe même pas trop de poussière: parfait. La piste rejoint un des rares coins vaguement touristique du Cameroun, un village dont beaucoup de Camérounais m'ont parlé: Rhumsiki. Effectivement, j'arrive pile au soleil couchant et la vue sur la plaine est superbe.


J'ignore les hôtels et me pose dans un camping en construction: pas d'eau, pas d'ombre, donc je négocie le prix dur. L'essentiel c'est qu'ils aient un groupe, et de la bière fraîche. Je croise un groupe de touristes italiens qui reviennent d'une cérémonie traditionnelle dans un village du coin; bon, moi j'ai donné, je passe.



Les groupes de touristes semblent visiter les villages alentours selon les horaires du marché: moi j'y pars justement lorsque c'est pas le jour de marché et j'évite donc les foules de quechua. Les villages sont sympas, très typiques.



A Tourou, selon ma carte je suis dans un cul-de-sac. Mais selon les locaux, il y a un chemin qu'ils prennent à moto, et qui m'éviterait de faire demi-tour: parfait, c'est exactement ce que je cherche.



Effectivement, la route se termine et il reste plus qu'un chemin pas très large, mais les traces de pneus montrent que c'est possible. Lorsque je les perds, je m'arrête pour demander si je suis toujours juste, mais je galère parce que personne ne parle français. On dirait que dès que le village n'est plus connecté au reste du pays par la route, les enfants ne vont plus trop à l'école.


J'ai pas le choix, je repars mais le chemin devient plus que chelou. Je persévère quand même, on sait jamais, mais je suis bien obligé de renoncé quand ça devient trop limite.



Plus qu'à retourner sur mes pas. J'essaie de nouveau de demander mon chemin, mais le message passe pas.



Par contre on m'offre un peu de bière de millet, elle est bien fraîche et ça fait pas de mal. Je m'avoue vaincu et reprends la route normal, jusqu'au dernier bled avant la frontière. Je négocie une chambre avec eau courante et clim dans un hôtel qui a de la bière fraîche. Mais qui sert aussi de bar pour tout le quartier avec de la musique à donf. C'est toujours le même dilemne en Afrique: ou bien c'est un coin tranquille mais sans électricité et donc la bière est chaude, ou bien ils peuvent s'offrir de faire tourner le groupe, mais c'est en général parce qu'ils en ont besoin pour la sono. Et la musique de bar à bière, c'est pas vraiment ça.

 Demain: Nigéria.

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