Saturday, December 10, 2011

Mécanique et tourisme au Cameroun


Une fois le calme revenu dans la cour de récréation, le principal problème est de créer un espace de travail à peu près propre, si du sable s'introduit dans l'huile de fourche je peux recommencer dans 1000 km.



Je démonte donc les fourches, je change les 2 joints spi et je remonte avec l'huile que j'ai apportée. J'y mets le temps mais c'est pas si compliqué, finalement, y'a pas vraiment moyen de se planter si on fait les choses tranquillement.


Je vais faire un tour pour tester le tout et acheter 3l de 15/40 chez OilLibya pour faire une vidange, tant que j'y suis, ça peut pas faire de mal. 



Le lendemain je vais faire souder des barres d'appui sur le rack pour que je puisse y adapter les sacoches cavalières en remplacement de mes valoches qui tenaient plus vraiment tellement le bazar est déformé. J'ai trouvé un atelier où ils font ça avec un masque de soudure et pas des lunettes de soleil, c'est un signe, ça doit être des pros. Ca a l'air de tenir pas trop mal, ça va le faire.



Avec le changement du garde-chaîne et la protège-bottes la bécane est fin prête. Moi par contre, il me faut encore un visa pour le Nigeria. Il y a un consulat a Buea qui en donne, semble-t-il sans trop de chichis, et c'est pas très loin, au pied du Mt Cameroun.



Je pars lundi matin en slalomant dans le trafic infernal (normal, vu le nombre d'auto-écoles "françaises") et je cherche un moment le consulat, pour finalement le trouver tout en haut du bled à la limite du brouillard. Le mont Cameroun, on doit pas le voire souvent. 


Sur la porte d'entrée les horaires sont affichés: dépose des dossiers le mardi, remise du visa le jeudi. Argh. Je rentre quand même me renseigner, et je tombe sur un type qui me file le formulaire. Il me dit qu'il a besoin d'une lettre d'invitation (je m'y attendais). Je lui propose une réservation d'hôtel et il est OK. Je repars illico au bled chercher un cyber-café, je ponds une lettre bidon et reviens 1/2h plus tard: tout est en ordre, il prend les papiers et mes 50'000 balles, part chercher un signature et revient 10 minutes plus tard avec son carnet de tickets. En une 1h c'est réglé, c'est pas cool ça ? Bon, c'est encore 90€ qui part en fumée, mais je me console en voyant le prix pour les italiens: 218'000 CFA, soit plus de 300€. A mon avis, je vais pas en croiser beaucoup des macaronis au Nigeria.



A l'entrée de Douala, je suis bloqué dans les embouteillages et discute un peu avec le chauffeur d'une Corolla modifiée en utilitaire, avec chassis enforcé. 2-3 bananes dans le coffre..


.. et quelques ananas pour la route. 



Tout est prêt, je suis dans les starting blocks. 


C'est là que Tabie me parle d'une fête traditionnelle qui a lieu tous les 2 ans à Bandjoun, son village d'origine, avec la présence du roi, et il faut absolument que je voie ça. Bon, OK, ça fait guère que 3 jours de plus à traîner à Douala, je vais pas en mourir, même si la température et l'humidité rendent la vie misérable. Vendredi finalement je me barre et pars "à l'ouest" comme ils disent, c'est à dire dans la province de l'Ouest. Je traîne un peu au passage, je vais voir une chute d'eau où ils ont tournés un "Tarzan" (bof), et je rejoins Tabie chez des "neveux" qui habitent à Bafoussam (la famille Africaine est un concept à géométrie variable). Très gentiment  elle m'a proposé de m'accompagner.



Le lendemain, départ au petit matin pour la place de fête de Bandjoun. En fait le matin il n'y a que des danses folkloriques parfaitement inintéressantes, d'ailleurs les locaux ont l'air au courant parce que y'a presque personne. A midi on se pointe au banquet officiel à la chefferie avec notre invitation VIP, un truc à l'européenne avec tout les nice people du coin. On a droit à moult discours champignaciens de divers officiels, y compris une allocution du king himself. Je m'attendais à ce qu'il soit déguisé genre Bokassa mais non, très sobre, un boubou et c'est tout. Un peu décevant. Après avoir fini le Bordeaux (noyé dans le fanta par les mamans locales) et le Moët et Chandon (y'a de la thune dans le budget culturel), on retourne sur la place. 




Après 2h d'attente, finalement on a droit à la danse traditionnelle que tout le monde attend. Cette fois c'est la grosse ambiance, les danseurs arrivent masqués et portant sur le dos une peau de panthère, font le tour de la place jusqu'à la tribune officielle accompagnés d'excités qui tirent en l'air avec des vieilles pétoires. Sympa et "haut en couleurs", comme le répète le commentateur officiel.



Après une dernière nuit chez Angèle, je fais mes au revoirs définitifs cette fois, et je pars pour la Ring Road, dans la partie anglophone. En fait, après avoir été confisqué à l'Allemagne, le Cameroun a été géré conjointement par la France et l'Angleterre. Quand il s'est agi de décoloniser tout ce bazar et de créer des pays indépendants suivant des frontières forcément totalement artificielles, les Anglais ont pas osé rattacher, logiquement, leur partie au Nigéria voisin qui allait également gagner son indépendance. Ils ont organisé un référendum et comme premier exercice démocratique de leur vie, les locaux ont décidé à moitié de rejoindre le Nigéria et à moitié le Cameroun. Bien malin qui a pu leur expliquer sur quels critères choisir entre 2 pays fictifs créés par l'homme blanc, ce qui augure bien du merdier "démocratique" qui va suivre. Donc depuis l'indépendance le Cameroun se coltine une petite minorité anglophone et a adopté deux langues officielles. En fait c'est une assemblage de plus de 200 ethnies qui n'ont rien de commun entre eux. Même pas la religion, au sud ils sont chrétiens et au nord musulmans. Heureusement, et remarquablement pour la région, la cohabitation se passe très pacifiquement. Et aujourd'hui, ni les Lions Indomptables, ni les Super Eagles ne sont qualifiés pour la CAN, donc pas de jaloux.



Intelligemment, ils ont conservé leur pouvoir coutumier, le chef ou "fon", qui bien qu'assujetti à l'autorité et aux lois civile, garde un rôle très important dans la société camerounaise (en campagne en tous cas, dans les grandes villes c'est bien fini tout ça). Il n'y a pas de transmission du pouvoir à la descendance, les chefs sont choisis (et contraints) par la population pour remplir le poste, selon ses capacités, même s'ils viennent souvent de la même famille (ça explique peut-être les "dynasties électives" de Bongo au Gabon ou Kabila au Coungo, par exemple). Il va habiter à la chefferie, où il recevra ses sujets qui viennent lui demander de résoudre des conflits ou les aider dans une démarche. Evidemment, et selon l'importance de la chefferie, il habitera dans une immense villa et se déplacera en 4x4 Mercedes, comme le roi de Bandjoun qui nous a offert le Champ, ou habitera dans une paillote sans électricité comme le chef de Somié qui m'accueillera plus tard, mais dans tous les cas il est très respecté par la population, et se fait appeler "Sa Majesté". En principe, moi j'ai quand même de la peine.

Bon, assez de tourisme, demain j'attaque les routes un peu plus intéressantes.


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